Le grand absent de ce texte est la population

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dès le début de la discussion sur ce projet, nous avions fait part de nos critiques et de nos remarques, notamment sur la méthode employée. Cette méthode a effectivement conduit à privilégier, d’abord, une réflexion sur des périmètres plutôt que sur le fond des choses, à savoir les raisons et les objectifs qui nous conduisaient à revoir ce découpage des régions.

Car s’il est légitime de vouloir éventuellement modifier l’organisation territoriale, cette réforme doit bien évidemment s’accompagner d’une amélioration de la vie de nos concitoyens. Ce point est pour nous très important et il convient, en particulier, de veiller à ce que ces nouvelles régions puissent contribuer à réduire les inégalités sociales et territoriales.

Or le seul projet qui nous a été proposé – à cet égard, on peut parler d’absence de vision, comme l’ont souligné des orateurs de différents bords politiques – était fondé sur l’argument d’une attractivité accrue pour de grandes régions, dont la puissance allait permettre de résoudre les problèmes. Or nous savons bien qu’il n’en est rien. Si je prends l’exemple de la région Île-de-France, sans doute la région la plus puissante de notre pays, mais aussi l’une des plus puissantes d’Europe, c’est aussi la région où les inégalités sociales et territoriales sont les plus criantes – et, malheureusement, ces inégalités continuent de se creuser.

La taille et la puissance ne règlent dont pas tous les problèmes. Il faut aussi considérer le projet politique et les moyens qui lui sont associés, qui seuls permettent de corriger les choses plus en profondeur.

Malheureusement, la méthode employée ne nous permet pas de le faire, et c’est la raison pour laquelle nous nous sommes peu engagés dans le débat sur le découpage même des régions. En effet, ce projet, de la manière dont il a été abordé, a plus contribué à diviser les Français qu’à les rassembler. Et telle est bien sa limite. Nous l’avons vu à travers les débats, qui ont été marqués, sur certains territoires, – ne nous le cachons pas – par des réflexes identitaires ou protectionnistes, qui visaient aussi parfois à éviter des regroupements avec des régions plus pauvres.

Ce projet n’est donc pas à la hauteur des ambitions que nous pouvons avoir pour notre pays.

De surcroît, il est vrai qu’il y a dans ce débat un grand absent, la population elle-même. Toutes les mesures qui existaient, y compris dans les projets de loi, sur les consultations ou les référendums sont aujourd’hui écartés au profit de décisions prises par des élus, au moment où les citoyens aspirent au contraire à être davantage associés aux décisions qui sont prises pour leur avenir.

Pour nous, ce texte constitue donc un peu, effectivement, un rendez-vous manqué.

J’espère que dans le cadre du projet de loi NOTRe nous pourrons travailler à apporter d’autres améliorations à l’organisation territoriale de notre pays.

J’exprimerai malgré tout une satisfaction – il faut le dire – à l’égard des départements. Ces derniers étaient en effet extrêmement menacés par tous les propos tenus depuis des mois par le Premier ministre et par le Président de la République. À l’inverse, ils sortent plutôt renforcés de ce débat. En effet, chacun dans cette assemblée a pu faire la démonstration du rôle et de la place irremplaçables des départements dans la cohésion sociale et territoriale de notre pays. Dans le cadre de ces futures grandes régions, nous avons effectivement besoin de cet échelon intermédiaire, de cet échelon de proximité, qui continue de rendre des services extrêmement importants à la population. Dans la période de crise que nous vivons, il ne faut surtout pas déstabiliser encore un peu plus les territoires.

Je ne sais pas si les départements survivront forcément à l’échéance 2020, mais le Premier ministre a été obligé d’entendre les voix qui s’élevaient dans le pays à ce sujet. Nous ne pouvons donc que nous satisfaire que les départements se voient en quelque sorte confortés dans leur rôle. Nous verrons, lors du débat sur le projet de loi NOTRe, si cette tendance se confirme.

Toutefois, pour l’heure, nous ne pouvons nous satisfaire de ce texte. En conséquence, notre groupe ne votera pas ce projet de loi.

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