Nous refusons de remplacer l’ARAF par l’ARAFER

Monsieur le ministre, vous le savez, la pédagogie est l’art de la répétition. (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Vous êtes orfèvre ! (Sourires.)

M. Christian Favier. Or notre amendement n° 1000 tend à souligner les conséquences de la transformation de l’ARAF en ARAFER. Derrière le changement d’acronyme, se cache en réalité le démantèlement des services de l’État, votre projet consistant, monsieur le ministre, à retirer du ministère des transports les actuelles directions régionales de l’équipement et directions interdépartementales des routes.

En écartant du giron de l’État ces services déconcentrés ou à compétence territoriale, vous transférez à une autorité administrative prétendument indépendante l’intégralité des personnels des services des routes, avec toutes les conséquences que cela emporte pour ces agents comme pour les territoires.

Nos territoires sont déjà en souffrance, du fait, on le sait, d’un retrait massif des services de l’État au cours des dernières années. Toutefois, c’est sur d’autres aspects du problème, trop rarement soulignés, que je souhaite insister.

En effet, les personnels concernés sont exposés à des conséquences extrêmement dangereuses. Nous ne pouvons que relayer leurs craintes quant au maintien du statut des agents, à la conservation des effectifs et à la préservation des rémunérations.

La réorganisation des services des directions régionales de l’équipement, les DRE, et des directions interdépartementales des routes, les DIR, s’est déjà révélée une source de tensions et de stress pour leurs agents, et la refonte administrative qui s’annonce, avec la fusion du ferroviaire et du routier, posent de sérieuses questions en termes de risques psychosociaux.

Nous refusons que les agents soient, une nouvelle fois, les victimes des réorganisations technocratiques successives des services de l’État. De même, nous refusons de laisser se poursuivre le démantèlement des transports publics.

En passant de services déconcentrés à une autorité administrative dite « indépendante », le Gouvernement fait le calcul d’une réduction des coûts et avance, comme argument, une meilleure maîtrise des transports.

Mes chers collègues, à cet égard, permettez-moi de vous rappeler les conclusions d’un rapport d’information que la commission des lois du Sénat a consacré au bilan des autorités administratives indépendantes pour la période courant de 2006 à 2014.

Les auteurs de ce rapport préconisent de rationaliser le régime juridique de ces instances et leur structure, en fixant, dans une loi organique, les règles encadrant la création et l’organisation des autorités administratives et publiques indépendantes. Surtout, ils proposent de faire précéder d’une étude d’impact toute création, extension de compétences ou transformation d’une autorité administrative indépendante.

Or, en l’espèce, force est de le constater : l’étude d’impact ne s’attache absolument pas à mesurer les effets d’une réforme de l’ARAF par l’adjonction de la compétence du transport routier. Ce document se contente de faire référence à « la création d’une autorité multimodale des transports qui contribuerait à l’unification croissante de l’action publique en matière de transports ».

Si tel est réellement le but visé, nous avons, pour notre part, une solution alternative : nationaliser les autoroutes et créer ainsi un grand service public des transports !

Vous le savez, les membres du groupe CRC défendent ce projet de retour à la maîtrise publique et à la gestion des transports par l’État, à l’échelle nationale comme au niveau des territoires.

Aussi notre opposition à la création de l’ARAFER repose-t-elle sur des raisons de fond. Le Gouvernement pense, comme l’Union européenne le lui dicte, que les services sont mieux organisés et mieux rendus lorsqu’ils sont confiés à des autorités administratives dites « indépendantes » de l’État. A contrario, nous pensons qu’il est tout à fait possible de conserver un contrôle de l’État et de rendre aux usagers un service efficace et de qualité.

Enfin, nous pouvons émettre des doutes quant à la gestion démocratique de ces autorités administratives indépendantes. Comme l’a rappelé le rapport sénatorial que je viens d’évoquer, le respect des règles déontologiques par les membres de ces instances dans le cadre de leur mandat reste, à ce jour, largement insuffisant.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous refusons de remplacer l’ARAF par l’ARAFER.

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