La marine marchande est un laboratoire en matière de dumping social

La marine marchande est un laboratoire en matière de dumping social - Loi Macron : Article 22 ter

Comme le précise le rapport du Sénat intitulé « Le droit en soute : le dumping social dans les transports européens » et publié en avril 2014, la marine marchande est un laboratoire en matière de dumping social. De nombreux outils sont à la disposition des entreprises pour échapper à l’application des normes sociales les plus élémentaires. Selon le rapport précité, « le recours aux pavillons de complaisance, désormais utilisés par certains États membres de l’Union européenne, ainsi qu’aux sociétés de main-d’œuvre, le manning, contribue à généraliser ce dumping social. »

Vous avez souligné, monsieur le ministre, que les conditions de travail et de vie de beaucoup de ces marins étaient souvent difficiles, mais, au lieu de remédier à cette situation, vous l’aggravez ! Vous nous dites qu’il faut apporter des améliorations au droit en vigueur et, dans le même temps, vous confortez l’environnement juridique qui contribue à cette concurrence déloyale, à savoir la possibilité de recourir aux sociétés de manning.

De plus, vous revenez sur tous les engagements pris par le Gouvernement. Pourtant, il y a peu, monsieur le ministre, au cours de ce même débat, vous nous parliez de l’importance du respect de la parole de l’État. Vous comprendrez que nous ne soyons pas partisans du « deux poids deux mesures » ! En effet, M. Frédéric Cuvillier, lorsqu’il était en charge des transports, s’était engagé au nom du Gouvernement, à adopter deux mesures phares.

La première consistait dans l’obligation, pour l’armateur, quelle que soit la nationalité du pavillon, de conclure avec le marin un contrat d’engagement maritime de droit français, et non pas seulement traduit en français ! Dans le secteur de la navigation, le respect de ce principe interdit le recours aux sociétés de manning et, par conséquent, interdit la mise à disposition du marin étranger avec le statut de travailleur détaché.

La deuxième mesure devait être la mise en place d’une nouvelle législation en 2014. Elle n’a jamais vu le jour ! Elle était pourtant censée garantir, notamment, le respect de l’obligation républicaine du contrat de travail de droit français, renforçant ainsi l’ensemble des conditions sociales appliquées aux salariés engagés sur tous les navires exerçant des activités régulières dans les eaux territoriales françaises et basés dans les ports français.

Au lieu de quoi, cet article, introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, conforte les sociétés de manning au nom de la compétitivité, comme vous l’avez souligné devant nos collègues députés. Vous acceptez tout simplement d’accroître la précarité et d’ouvrir la possibilité d’embaucher sous le statut de travailleur détaché des marins qui travaillent pourtant au pays des droits de l’homme !

Vous nous dites que nous courons le risque de licenciements en masse. Malheureusement, ils se produisent déjà ! Nous refusons d’appauvrir les travailleurs en prenant pour prétexte le maintien de l’emploi : cela ne fonctionne pas ! Et, dans le même temps, de nombreux cadeaux ont été faits, sans contreparties obligatoires en matière d’emploi, aux armateurs français...

Comment pouvez-vous penser qu’introduire plus de libéralisation et de déréglementation dans la marine marchande préservera et relancera l’emploi de navigants français ?

Selon nous, c’est la concurrence déloyale qu’il faut combattre, et non la protection sociale !

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