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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances pour 2007 : outre-mer

Par / 6 décembre 2006

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, année après année, à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », nous posons avec gravité la complexité des enjeux liés au défi du développement des régions ultramarines.

Année après année, nous plaidons devant la représentation nationale en faveur d’une véritable ambition pour l’outre-mer, liée au rayonnement de la France et de l’Union européenne.

Année après année, nous rappelons que la valorisation de nos atouts serait profitable à la nation tout entière.

Année après année, nous tentons de tordre le cou aux idées simplistes selon lesquelles l’outre-mer coûterait cher à la France, en rappelant l’avantage économique et géostratégique incomparable d’une présence sur tous les océans.

Mais année après année, nous constatons que le saut qualitatif attendu n’est pas au rendez-vous. Pire, nous observons avec quelque inquiétude, dans le débat national, le rétrécissement de la vision et le repli sur des limites nationales et continentales.

Affaire de génération ? Peut être ! Mais nous craignons qu’une vraie ambition pour l’outre mer ne soit emportée par le désintérêt patent aujourd’hui pour le monde.

Et ce n’est pas dans la continuation d’une politique routinière, dont ce budget est l’illustration, que ce défi sera relevé.

Les limites des politiques conduites jusqu’à présent, notamment en matière de lutte contre le chômage, obligent à faire preuve d’imagination. Nous avons le devoir d’innover et d’ouvrir des perspectives pour les milliers de jeunes, souvent diplômés, qui n’ont aucune assurance de s’insérer à la Réunion dans le monde du travail.

Projetons-nous donc avec audace au-delà de nos limites insulaires, aussi bien vers les marchés des pays européens que vers ceux de nos voisins qui, les uns comme les autres, sont nos partenaires naturels.

Inventons des coopérations nouvelles, tirons parti du niveau de formation de notre jeunesse et incitons-la à se déployer là où elle peut être utile et oeuvrer avec nos voisins pour le codéveloppement.

La Réunion ne sera pas une « colonie colonisatrice ». Mais sa jeunesse doit pouvoir s’inscrire dans le mouvement du monde et des échanges. La voie est aujourd’hui ouverte par les nombreux accords de coopération initiés par la région Réunion. Une sortie par le haut dans la recherche de nouvelles frontières, c’est bien là, mes chers collègues, la voie à suivre qui mérite d’être amplifiée et soutenue.

Mais ces perspectives ne doivent pas faire oublier la réalité d’aujourd’hui à laquelle nous ramène le budget pour 2007.

La réalité, c’est que l’on ne peut se glorifier d’un taux de chômage de plus de 28 %, de l’aggravation des inégalités et de la détérioration des conditions de vie des Réunionnais, notamment en matière de logement.

S’agissant de l’emploi, l’engagement de grands chantiers d’initiative régionale, sans précédent, aura contribué à un taux également sans précédent de créations d’emplois dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

De même, des secteurs innovants comme le transport aérien ou les énergies renouvelables auront été créateurs d’emplois.

Lorsque des avancées sont au rendez-vous, elles méritent d’être soulignées, car elles témoignent de la capacité des Réunionnais à tirer le meilleur parti de certains dispositifs. À cet égard, cela devrait inciter à inclure la recherche dans le champ d’éligibilité de la défiscalisation.

La défiscalisation, il en a été beaucoup question et nous attendons avec intérêt les conclusions de la mission d’évaluation en cours.

Ces quelques motifs de satisfaction ne doivent pas occulter l’essentiel : nous conservons un taux de chômage record qui avoisine les 30 %. Combien de temps encore la société réunionnaise saura-t-elle trouver des petits arrangements pour supporter l’insupportable ?

Nous devons aussi penser à celles et à ceux qui, durant la même période, sont restés ou ont été mis sur le bord du chemin, notamment par la diminution des contrats aidés. Pour l’ensemble de l’outre-mer, le nombre de ces contrats financés par le ministère de l’outre-mer est passé de plus de 67 500 en 2000 à moins de 54 000 en 2005.

La vérité oblige à considérer que, malgré un taux de croissance dynamique de 5 %, l’économie réunionnaise ne pourra, compte tenu de notre structure démographique, absorber en totalité la demande d’emplois. Mais nous devons, de manière responsable, en tirer les conséquences en reconnaissant dans le même temps l’importance du champ de l’économie sociale.

L’extinction du dispositif de congé-solidarité a soulevé à la Réunion une mobilisation en faveur de son prolongement. Sur l’initiative du Gouvernement, l’Assemblée nationale a décidé sa prorogation pour un an, assortie d’une série de conditions. La participation de l’État a été ramenée de 60 % à 50 %. À l’évidence, la précipitation, l’improvisation, les petits calculs et les effets d’annonce auront en définitive accouché d’une solution qui ne satisfait personne.

S’agissant du logement, là encore, année après année, nous revenons devant la représentation nationale porteurs des mêmes demandes et avec un diagnostic toujours aggravé. Jamais ce secteur n’aura été aussi sinistré qu’il ne l’est aujourd’hui, tant la diminution continue des moyens financiers et les effets pervers de la défiscalisation ont aggravé l’écart entre la production de logements sociaux et une demande toujours croissante.

Ce qui a manqué, c’est la volonté politique. Car les solutions, elles, sont connues et ne demandent qu’à être concrétisées pour répondre à l’aspiration légitime des milliers de familles en attente d’un logement décent.

Le Premier ministre a annoncé aux Antilles un train de mesures pour le logement social outre-mer, sans doute pour remédier à l’inégalité de traitement née de l’exclusion de l’outre-mer du bénéfice du plan Borloo.

Cela va dans le bon sens, mais reste insuffisant. Nous aurions préféré la mise en oeuvre d’une loi spécifique sur le logement outre-mer, telle qu’elle est attendue par tous les acteurs du logement social dans les départements d’outre-mer.

La flambée des loyers et l’augmentation du prix des intrants, notamment des carburants, auront contribué à la détérioration du pouvoir d’achat des Réunionnais.

Cela me conduit à évoquer de nouveau la question relative à l’installation de l’observatoire des prix et des revenus prévu à l’article 75 de la loi d’orientation pour l’outre-mer. Monsieur le ministre, vous avez rappelé hier, à l’Assemblée nationale, que des études seraient engagées pour examiner la faisabilité de cette mesure.

Les données produites par cet observatoire des prix, mais aussi des revenus, de tous les revenus, seront d’autant plus essentielles que pas une ligne, pas un mot n’est consacré à l’outre-mer dans l’important rapport que le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le CERC, a récemment remis au Premier ministre.

La question des prix et des revenus est éminemment complexe à la Réunion, notamment en raison de la structure des salaires et de l’existence de surrémunérations dans la fonction publique.

Mon prédécesseur, le président Vergès, l’a rappelé plusieurs fois, ici même, devant la Haute Assemblée : la Réunion n’est rétive à aucune réforme. Au contraire, tout peut être mis sur la table, mais dans le respect scrupuleux de deux conditions : premièrement, rien ne saurait se faire sans la concertation la plus large et la production de données indiscutables, notamment sur le coût de la vie ; deuxièmement, aucune économie réalisée au budget de l’État ne devrait se traduire par un appauvrissement de notre île.

Sur ce plan, force est de constater que le précédent né de la suppression de la prime d’éloignement n’incite guère à l’optimisme.

Force est également de s’interroger sur la motivation de celles et de ceux qui, aujourd’hui, dans des sphères influentes, militent avec constance et détermination en faveur de la suppression de ces surrémunérations, dont le dernier épisode en date concerne la majoration des retraites versées outre-mer.

Aborder l’outre-mer sous le seul aspect des économies de fonctionnement que devrait faire l’État, c’est lui manifester un manque de considération qui ne l’aide pas à relever tous les défis auxquels il est confronté.

Sans ironie aucune, j’invite d’ailleurs celles et ceux qui n’ont pour seule préoccupation que de faire la démonstration que l’outre-mer coûterait cher à la France à s’interroger sur ce que nous apportons à la nation et à l’Union européenne.

Pas plus danseuses que pleureuses de la France, nous refusons l’enfermement dans des champs étroits et assumons sans complexe notre liberté d’être avant tout pleinement nous-mêmes, ici et ailleurs à la fois.

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