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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances rectificative 2003

Par / 15 décembre 2003

par Marie-Claude Beaudeau

Avec ce projet de loi de finances rectificative pour 2003, on ne peut pas parler de simple « rectification ». Le déficit budgétaire a augmenté de 20 % ; et avec 5,9 milliards d’euros d’annulations par rapport à la loi de finances initiale, c’est presque un autre budget 2003 que nous examinons, ou plutôt que nous sommes invités à valider a posteriori. Un budget qui aggrave encore les tendances lourdes - injustice sociale et austérité anti-économique - du budget initial.

 À la lumière de ce collectif, on peut concevoir les plus grandes craintes pour l’exécution du budget pour 2004 que nous venons de voter. Y aura-t- il, comme en 2003, des gels de crédits dès février, des annulations dès mars, tout cela au nom d’un déficit budgétaire que vous vous ingéniez vous-même à creuser ? Dans le collectif, ce déficit augmente de 9 485 millions par rapport à la loi de finances initiale, pour atteindre 54,1 milliards - en hausse de 4,8 % par rapport à 2002 - soit 4 % du P.I.B.

 À l’origine, on trouve une prévision de croissance complètement irréaliste de 2,5 %, et réduite finalement à 0,5 % dans ce collectif, comme dans le budget pour 2004. Or, l’INSEE prévoit que la hausse d’activité n’excédera pas 0,2 % voire 0,1 % cette année ! Cette chute de la croissance a induit de fortes moins-values fiscales. Simultanément, vous avez annulé 900 millions de crédits inscrits dans la loi de finances initiale.

 C’est une preuve supplémentaire des effets dévastateurs de vos choix fiscaux. Ainsi, la baisse de l’impôt sur le revenu a privé le budget de trois milliards d’euros, portés à cinq si l’on intègre la baisse décidée par le précédent gouvernement. De même, l’extension depuis 2002 des déductions de cotisations patronales dépasse deux milliards !

 Monsieur le Ministre, en défenseur zélé du pacte de stabilité, vous n’aviez cessé de fustiger le déficit. Maintenant, vous le laissez filer à 4 % du P.I.B., défiant ainsi Bruxelles !

 En fait, vous proscrivez la relance de la consommation populaire, mais en revanche vous prodiguez allégrement les cadeaux fiscaux au plus aisés.

 Vous instrumentalisez le déficit pour saper les dépenses publiques et sociales, tout cela en parfaite entente avec la Commission européenne. Au passage, vous renforcez l’emprise des marchés financiers sur notre pays. Tel est le sens de l’exercice auquel vous vous êtes livré cette année sous le joli nom de « régulation » : partant d’hypothèses insincères, vous mettez ensuite le peuple devant le fait accompli. Il ne vous reste plus qu’à vous réjouir - malgré un solde catastrophique - d’avoir tenu vos objectifs de dépenses. Vous êtes satisfait d’avoir amputé de 400 millions les crédits de l’urbanisme et du logement, alors que l’on compte 3,5 millions de mal logés. Le million de personnes qui attendent toujours un logement social apprécieront ! De même, vous avez amputé 13 % des moyens attribués au ministère de l’Écologie. Pour la première fois dans l’histoire, vous avez suscité une grève des agents du Quai d’Orsay, dont 10 % des crédits d’équipement administratif et 5 % de ceux destinés aux établissements culturels ont été supprimés. Une diplomatie qui manque de papiers, de gommes et de crayons : voilà votre grande politique extérieure censée renforcer l’attractivité de la France !

 Je pourrais citer d’autres exemples, comme l’annulation de 30 % des crédits de recherche de l’Ifremer, de 13 % des crédits de l’ADEME et de presque tous les moyens destinés aux transports urbains en site propre. Les universités seront-elles chauffées tout cet hiver, ou bien devront-elles fermer durant les vacances de février, comme l’an passé ?

 Avec cette logique budgétaire, vous enfoncez la France dans la récession !

 À côté des six milliards de dépenses annulées - dont 5,3 inscrites dans ce collectif - vous ouvrez 4,3 milliards de dépenses nouvelles. Mais vos choix sont éloquents ! Certes, il n’y a rien à redire quant aux avances accordées aux agriculteurs après la sécheresse, ni quant à la lutte contre les feux de forêt. En revanche, l’augmentation de la prime de Noël et des crédits consacrés au R.M.I. ne traduisent que le naufrage de votre politique économique ! Par ailleurs, augmenter de 400 millions le coût des opérations militaires extérieures (Opex), ainsi porté à 629 millions, est extrêmement contestable, car c’est s’engager sur la voie d’une militarisation de notre politique étrangère que nous récusons. La perspective d’inscrire les Opex dès la loi de finances initiale à partir de 2005 nous inquiète, car cela transformera des actions exceptionnelles en routine !

 Venons-en aux dispositions nouvelles. Vous prodiguez la « discrimination positive », notion à la mode (M. le ministre délégué manifeste sa perplexité), au profit des plus riches ! Comment interpréter autrement les ponts d’or fiscaux octroyés par l’article 17 aux hauts dirigeants d’entreprises internationales, qui pourront désormais soustraire au revenu imposable la fraction prétendument liée à leur expatriation, ainsi que les cotisations sociales versées dans leur pays d’origine ! Pour ces grands patrons, la France deviendra ce que Monaco ou la Suisse sont pour les champions de tennis et les chanteurs à succès ! Tout cela au nom de l’attractivité !

 Cette générosité étroitement ciblée contraste scandaleusement avec les nouvelles restrictions apportées à l’aide médicale d’État. Après la mesure votée en catimini lors du collectif pour 2002 - que vous n’aviez pas appliquée après la remarquable mobilisation des associations et la promesse arrachée à Mme Versini - vous revenez à la charge contre la gratuité des soins, puisque son bénéfice sera réservé aux personnes justifiant de trois mois de résidence sur le territoire national. En outre, un ticket modérateur sera institué. Cette disposition, moralement critiquable, est irresponsable en termes de santé publique !

 Voilà bien votre conception de l’attractivité : vous rejetez les pauvres comme des parias, mais vous déroulez le tapis rouge pour les princes de la finance et des affaires !

 Toujours pour combler le déficit, vous faites littéralement les poches de plusieurs organismes de recherche agricole afin d’alimenter le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), pour une somme ramenée à 157 millions par l’Assemblée nationale. Vous prélevez dix millions sur l’institut français du pétrole et autant sur l’Institut national de la propriété industrielle. De façon inacceptable, vous puisez dans le fonds de renouvellement urbain : sur 106 millions, 56 seraient destinés à la nouvelle Agence nationale de renouvellement urbain, mais 50 iront directement au budget de l’État.

 Parallèlement, le dispositif des zones franches urbaines est encore étendu, alors qu’il est coûteux et crée peu d’emplois. Enfin, vous profitez du collectif pour aggraver la mise en cause de l’archéologie préventive.

 La création d’une taxe sur les nuisances aéroportuaires pourrait nous convenir, mais son produit attendu est très insuffisant. Nous tâcherons au moins d’obtenir que ces 55 millions reviennent bien aux riverains, sans oublier l’ouverture d’un droit aux agents de l’État victimes de l’amiante. Mais la rédaction ambiguë de l’article paraît en réserver l’application aux agents des constructions navales…

 Nous voterons contre ce projet de loi qui favorise les nantis au détriment des travailleurs !

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