Nos propositions de loi et de résolution
Pour une « trêve olympique » des expulsions locatives
PPL du groupe CRCE-K tendant à instituer une trêve olympique des expulsions locatives des occupants de bonne foi sans solution de relogement, -
Par Ian Brossat / 16 février 2024En effet, certains propriétaires font part de leur intention de louer à prix d’or leur bien sur des plateformes comme Airbnb, ce qui nécessite l’expulsion des locataires actuels pendant quelques semaines.
Du 24 juillet au 8 septembre 2024, la France accueillera les Jeux Olympiques et Paralympiques, un événement d’envergure réunissant 15 000 athlètes lors de 879 épreuves. Pour assurer le succès de cette manifestation d’exception, le gouvernement a d’ores et déjà introduit plusieurs ajustements législatifs.
La présente proposition de loi s’inscrit comme un complément nécessaire en instaurant une « trêve olympique », qui prohibe toute expulsion locative d’occupants de bonne foi entre le 31 mars et le 1er novembre 2024.
Elle vise à répondre à l’augmentation du nombre de congés pour reprise et pour vente signalés aux agences départementales d’information sur le logement dans les grandes métropoles et à prévenir les abus de bailleurs qui exploiteraient opportunément ces festivités pour s’enrichir au détriment des locataires résidents à l’année.
Le contrôle a posteriori des congés prévus dans la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs est limité. Seul le locataire peut engager les démarches. Elles sont complexes et il est difficile de prouver que le congé donné est frauduleux.
Afin de prévenir les dérives liées à un événement national d’une telle ampleur, les élus locaux demandent à renforcer l’arsenal législatif pour limiter les congés abusifs, lutter contre les locations touristiques illégales et multiplier les contrôles.
En outre, cette proposition de loi revêt une importance cruciale pour répondre à l’urgence de la crise du sans-abrisme, une réalité alarmante soulignée par les chiffres du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre.
La France compte actuellement 330 000 personnes sans domicile – soit le double qu’il y a 10 ans. Les expulsions locatives, ont atteint un nouveau record en 2023 avec 17 500 concours de la force publique exécutés. Le nombre de personnes qui perdent leur logement ne cesse de croitre.
Derrière ces statistiques se cachent des drames humains, des situations de vie difficiles telles que la perte d’emploi, la séparation ou la maladie.
Face aux effets de l’inflation, à la baisse du pouvoir d’achat et à l’augmentation du coût de l’énergie, il est impératif de protéger les ménages français, en particulier les plus vulnérables.
Avec la fin de la trêve hivernale le 31 mars 2024 et la réduction des délais d’expulsion depuis la promulgation de la loi Kasbarian-Bergé il existe un risque d’engorgement des commissions de prévention des expulsions.
Par ailleurs, la tenue exceptionnelle des Jeux Olympiques et Paralympiques occasionnera à l’été 2024 une sollicitation accrue des dispositifs d’hébergements alors que cette période se caractérise systématiquement par des capacités d’accueil moins nombreuses.
Enfin, les services sociaux, les fonctionnaires de police et de justice seront affectés pour grand nombre d’entre eux à des tâches liées à l’accueil de cet évènement exceptionnel - notamment dans les grandes métropoles.
La « trêve olympique » proposée par ce texte modifie le code des procédures civiles d’exécution pour proscrire toute expulsion locative entre le 31 mars et le 1er novembre 2024, sauf si une solution de relogement adaptée est garantie.
Elle permettra de mettre en place des solutions de relogement alternative au concours de la force publique.
Cette proposition s’inscrit dans la lignée des périodes de trêve qui existent depuis 1956, spécifiées à l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution. Celui-ci stipule qu’il est « sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille ».
Elle propose que ce moratoire s’applique pour l’année 2024 sur le modèle du dispositif mis en place par l’ordonnance n° 2020-331 du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trêve hivernale.
L’article unique de la présente proposition de loi prévoit ainsi une dérogation à l’article L. 412-6, en raison du caractère exceptionnel des Jeux Olympiques et Paralympiques, tel que mentionné dans la LOI n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Il propose une modification du code des procédures civiles d’exécution pour interdire le recours à la force publique par le préfet dans une procédure d’expulsion locative lorsque la ou les personnes visées ne disposent pas d’une solution de relogement adaptée à leurs besoins et moyens entre le 31 mars et le 1er novembre 2024.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
« Pour l’année 2024, la période mentionnée aux troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles et premier alinéa de l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution est prolongée pour l’occupant de bonne foi jusqu’au 1er novembre 2024. »
« Pour l’année 2024, les durées mentionnées aux articles L. 611-1, L. 621-4, L. 631-6 et L. 641-8 du code des procédures civiles d’exécution sont augmentées pour l’occupant de bonne foi de sept mois ».
« Ce moratoire des expulsions locatives entre le 31 mars et le 1er novembre 2024 s’applique également aux étudiants locataires, occupants de bonne foi, des résidences qui relèvent du code de la justice administrative lorsque les intéressés cessent de satisfaire aux conditions en raison desquelles le logement a été mis à leur disposition, par dérogation à l’article L 412-7 du code des procédures civiles d’exécution »