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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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A l’hypocrisie succède l’autoritarisme de Nicolas Sarkozy

Audition de M. Pfimlin, candidat au poste de président de France Télévisions -

Par / 12 juillet 2010

M. le président,
Chers collègues,
M. Pfimlin,

Le président de la République a donc soi-même nommé le président de France Télévisions pour en finir dit-il avec l’hypocrisie de la nomination par le CSA. Mais il remplace cette hypocrisie par une autre en sollicitant outre le CSA, notre commission des affaires culturelles et la commission semblable de l’Assemblée Nationale pour seulement un avis qui n’aurait de valeur que si 3/5ème de leurs membres s’opposaient à la nomination ce qui est impossible étant donné le poids de l’UMP. L’hypocrisie continue donc à plein.

Il y a plus. Le président peut démettre, révoquer et sans notre avis, le président de France Télévisions. A l’hypocrisie succède l’autoritarisme que résume bien M. Sarkozy : « écoutez les choses doivent être claires, il y a un actionnaire, cet actionnaire nomme un président » C’est le Pouvoir-Entreprise nommant directement le président de ce qu’il considère comme sa filiale France Télévisions- Entreprise.

Le président de la République a dit aussi : « Les médias ne sont ni des alliés ni des adversaires, ils n’ont ni cœur ni raison. Ils sont comme des chaudières, si vous êtes celui qui met du carburant vous existez ».

Et nous, nous n’existons plus. C’est le monde à l’envers, le cheval sur le jockey. Le chef de l’Etat-Entreprise ne propose pas, il dispose de l’entrée et de la sortie et n’assure même pas (quel mépris) au président de France Télévisions le carburant suffisant. C’est la dépendance absolue, « la maison tenue » dirait M. Sarkozy.
Avec mes collègues du groupe CRC-SPG nous n’en sommes pas. Qu’il soit clair M. Pfimlin, ce développement républicain ne vous vise pas comme ceux que j’ai tenus lors de la nomination de M. Jean-Luc Hess à Radio France. Ce sont les conditions de votre nomination qui ne passent pas et j’ai toujours crainte des males-nominations y compris pour celui qu’elle concerne. Jean-Luc Hess a été licencié de Radio France. J’ai été très solidaire. Puis il est nommé à la tête de Radio France. C’est toujours le même homme et pourtant il vient de licencier deux « irrespectueux » pour reprendre Roger Vaillant caractérisant « la singularité d’être français ». Ce sont les conditions de sa nomination qui font qu’une belle pensée professionnelle peut aboutir à un acte très critiquable. En fait opère là comme une main invisible.

Mais je ne désespère pas car comme le dit Karl Polanyi « le marché n’est pas un état de nature mais une pure construction de la société ». Ce n’est donc pas la fin de l’histoire de la télévision publique française. « L’histoire est ce qu’on agit et pas ce qu’on subit ».

Au cours du débat roboratif sur le texte de loi de M Sarkozy nous avons en effet par nos interventions, et d’autres gagné des atouts pour tout président de France Télévisions, des atouts à utiliser.
Le premier est la validation de la loi Sarkozy par le conseil constitutionnel du 3 mars 2009 sous la réserve expresse que la suppression de la Publicité sur France Télévisions soit compensée chaque année sous peine d’affecter son indépendance, d’autant qu’elle est « un élément essentiel pour assurer la réalisation des missions de service public ».

Or le financement de France Télévisions n’est pas assuré, il y a même danger d’un trou important que personne ne nie aujourd’hui. Vous-même M. Pfimlin avez évoqué au CSA un éventuel moratoire quant à la suppression de la deuxième partie de la publicité. J’en suis, mais tout de suite. Car on ne peut ignorer :
Le rapport de la Cour des Comptes du 14 octobre 2009 sur la fragilité de la situation financière et prévisionnelle du groupe.

L’opposition prévisible de l’Europe sur les taxes votées.
L’attitude de la majorité prête à réduire encore, voir à renoncer aux taxes sur la télé privée.

Encore la Cour des Comptes disant que ne devrait pas être exclue la révision du périmètre de France Télévisions rejoignant ainsi M Sarkozy qui dans son livre « Libre » en 2001 parlait même d’une privatisation d’antenne 2.
La récente déclaration de M. Bruno Lasserre président de l’Autorité de la concurrence réclamant le 6 juillet une loi pour réguler la télé à péages visant la position dominante de Canal +, mais posant en même temps une question conséquente pour France Télévisions : n’est-il pas envisagé une de ses chaines de France Télévisions devenant à péages ?

Soyons nets, dans le cadre du service public il n’y a plus que 2 solutions me semble-t-il pour avoir de l’argent :
Premièrement, l’augmentation de la redevance, impossible au niveau suffisant dans la conjoncture actuelle, d’immenses difficultés pour les gens modestes.
Deuxièmement faire payer des services comme la BBC notamment la nuit, mais produisant peu de recettes.

L’avis du Conseil Constitutionnel est un atout il faut lui faire jouer son rôle qui est de garantir l’indépendance de la télévision publique.

Il y a un deuxième arrêt celui du Conseil d’Etat du 11 février 2010 qui donne raison à la saisine du groupe CRC-SPG en déclarant illégale l’intervention du pouvoir dans la vie du conseil d’administration de France Télévisions. La direction à laquelle vous allez succéder l’a utilisé lorsque malgré l’avis du conseil d’Etat le pouvoir est intervenu pour obtenir l’autorisation de vendre la régie publicitaire à travers laquelle se profilait comme une collusion d’intérêts. La décision du conseil d’Etat est bien un atout démocratique qu’il faut utiliser même si la loi « sarkozystorique » sévit. Il est donc possible de faire des pas. « La pensée avant d’être œuvre est trajet » dirait Michaux. Encore faut-il dirait-il que « faute de soleil on sache murir dans la glace ». Il y a une route à prendre, peut-être des venelles à emprunter pour aller plus loin et je résumerai ainsi l’idée que le groupe CRC-SPG se fait de la télévision publique sans être exhaustif.

France Télévisions dont on aime l’histoire même tumultueuse œuvre de ses personnels professionnels de toutes catégories a permis à nos concitoyens d’atteindre ce qu’ils pensaient impossible pour eux. C’est la première des pratiques culturelles contemporaines. La quasi-totalité des français (95%) la regarde tout au long de leur vie. Elle a besoin d’un avenir à la hauteur de la place qu’elle a prise dans la société et l’ensemble des pratiques quotidiennes des citoyens.

France Télévisions service public a besoin outre d’un président, qui devrait être élu par le conseil d’administration profondément démocratisé :
Premièrement d’une équipe de direction professionnelle n’ayant de comptes à rendre que devant le conseil d’administration et récusant les « notes écrites » et « conseils oraux » venant de l’extérieur cela étant déjà inscrit comme liberté dans une proposition de loi du groupe CRC-SPG qui tend la main pour être discutée.

Deuxièmement, de programmes riches de leur diversité et de leur pluralisme concernant tous les domaines, l’information, la création, la connaissance, le savoir, le divertissement, le sport et les champs d’exercice de la citoyenneté tout cela défini par ceux qui font les programmes, ceux qui les regardent étant sollicités.

Troisièmement un développement audacieux, innovant, créatif de la création (fiction télévisuelle et documentaire) utilisant aussi les possibilités de productions internes.
Quatrièmement l’information doit être considérée selon le principe d’autonomie des rédactions.

Cinquièmement les personnels doivent bénéficier de droits et de responsabilités accrus dans les organismes de gestion. Les statuts et les conventions collectives doivent marquer des progrès à étendre à tout l’audiovisuel. Les personnels doivent pouvoir s’entretenir entre eux sur leur travail.

Sixièmement la modernisation et le développement du service public est nécessaire notamment, mais pas seulement, dans le « Global média », aussi dans tous les domaines, ce qui nécessitent de la recherche.

Septièmement, les budgets doivent être garantis sur une durée d’au moins 5 ans. Le financement de France Télévisions doit être croisé, redevance et publicité plafonnée.

Huitièmement, les téléspectateurs doivent être associés à la politique de France Télévisions comme élément de démocratisation.
Neuvièmement tous les domaines de la vie de France Télévisions doivent prendre en compte la diversité des territoires, local, régional, national, européen, international.

Toutes ces orientations osent se libérer des seules règles d’un jeu qui ne serait qu’économiquement profitable et socialement tolérable. Nous devons nous mettre à l’heure exacte de la conscience et de l’inaccoutumance. Ainsi commencerait à être inversée la loi intolérable d’aujourd’hui qui fait dominer les affaires de l’esprit par l’esprit des affaires.

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