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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Ce texte ne répond pas à toutes nos interrogations

Éthique du sport et droits des sportifs -

Par / 30 mai 2011

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord affirmer mon accord avec le constat qui vient d’être dressé par notre collègue Yvon Collin sur les valeurs du sport, donc exprimer mon étonnement devant cette proposition de loi qui, en dépit de son titre, s’apparente plutôt à un projet de loi portant diverses dispositions législatives dans le domaine du sport, dont un certain nombre semblent d’ailleurs reprendre l’avant-projet de loi pour la compétitivité et l’éthique du sport de 2009, que nous avions combattu avec ma collègue députée Marie-Georges Buffet et qui ne vit finalement pas le jour.

En outre, le caractère généraliste de la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui a été renforcé par les modifications apportées par la commission saisie au fond. Nous sommes donc face à un véhicule législatif permettant l’adoption de diverses mesures qui n’ont, me semble-t-il, pas grand-chose à voir les unes avec les autres, si ce n’est, évidemment, de concerner toutes le sport.

M. Alain Dufaut. Et l’éthique !

M. Jean-François Voguet. Aussi est-il difficile d’avoir une appréciation d’ensemble. Nous demeurons interrogatifs sur certains points, nous restons en désaccord avec d’autres, nous sommes enfin intéressés, et même plutôt favorables, à d’autres encore.

Si, dans la version initiale de cette proposition de loi, le renforcement de la place, du rôle et de l’indépendance des ligues professionnelles nous posait problème, nous saluons les transformations apportées par la commission de la culture dans ce domaine.

Cependant, le texte que nous étudions aujourd’hui ne répond pas à toutes nos interrogations, en particulier s’agissant de la suppression du pouvoir de sanction des fédérations dans les affaires de dopage. En effet, il nous semble que nous risquons, ce faisant, de déresponsabiliser les fédérations, alors que nous devrions au contraire renforcer leur intervention dans ce domaine essentiel.

Il est difficile de leur demander de faire plus en matière de prévention et de dissuasion et de leur retirer en même temps tout pouvoir de sanction, d’autant que l’actualité récente n’a pas mis en lumière de cas de dopages qu’elles n’auraient pas sanctionnés. À ce jour, aucun disfonctionnement de la chaine d’enquête et de sanction n’a été constaté dans le sport français. Aussi le transfert du pouvoir de sanction des fédérations à l’AFLD ne nous paraît-il pas opportun. Il pourrait même être interprété comme une mesure de défiance, alors que, à notre sens, celle-ci n’a pas lieu d’être.

En outre, si une telle mesure devait voir le jour, elle ne pourrait être décidée que dans le cadre d’un consensus partagé par l’ensemble des acteurs du mouvement sportif, à partir d’une réelle concertation. Aussi devrions-nous, plutôt que de légiférer, saisir l’occasion de l’installation de la première Assemblée du sport pour en débattre avec l’ensemble des acteurs du mouvement sportif.

Toujours dans le domaine de la lutte contre le dopage, nous ne pouvons accepter un débat à la sauvette, au détour d’un article, sur la ratification de l’ordonnance du 14 avril 2010 qui permet la mise en conformité du code du sport avec les modifications apportées aux principes du code mondial antidopage. En effet, même si nous sommes en accord avec ces dernières, en particulier avec la réduction des autorisations d’utilisation thérapeutique de produits dopants, sur laquelle nous avions émis d’importantes réserves, le débat parlementaire de ratification devrait, à notre sens, s’épanouir à l’occasion d’un ordre du jour particulier. Celui-ci favoriserait l’expression de toutes les sensibilités, l’engagement de chacun et celui de la représentation nationale.

Un vrai débat pédagogique pourrait ainsi avoir lieu, ce qui favoriserait la prise en compte de ces questions dans l’espace public et leur appropriation par le plus grand nombre. Ce choix n’a pas été fait, et nous le regrettons.

Cette proposition de loi, je le disais au début de mon intervention, est un texte quelque peu « fourre-tout ». J’en veux pour preuve, notamment, deux articles nouveaux retenus par notre commission, qui reprennent en réalité les dispositions d’autres lois censurées par le Conseil constitutionnel, ou qui tentent de faire échec à l’annulation, par ce même Conseil, de la loi de validation du contrat de concession du Stade de France.

Nous sommes donc très éloignés de l’intitulé de cette proposition de loi « visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs ». Nous pouvons même parler d’amendements « cavaliers » retenus par la commission de la culture !

L’article 6 bis nouveau introduit ainsi dans le code du sport ce que le Conseil constitutionnel a rejeté dans le code pénal. Dans la mesure où nous avons combattu ce type de mesures législatives au cours du débat sur la LOPPSI 2, vous ne serez pas étonnés, mes chers collègues, que nous votions contre ces dispositions.

Quant à l’article 32 nouveau, qui concerne la convention liant la Fédération française de football, la FFF, au Consortium du Stade de France, son objet a été débattu en séance voilà un mois à peine, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi relative à l’organisation du championnat d’Europe de football de l’UEFA en 2016. Nous avions été pour le moins interrogatifs au sujet d’un amendement tendant à aller dans le même sens que cet article, et je continue de penser qu’il faudrait profiter de la décision du Conseil constitutionnel pour mettre cette convention en conformité avec le droit.

Nous avons tous les éléments en main pour parvenir rapidement à élaborer une nouvelle convention d’exploitation de ce grand équipement qui soit moins onéreuse pour le budget des sports. Par ailleurs, s’il fallait légiférer pour valider cette nouvelle convention, un projet de loi aurait l’immense mérite de nous présenter une étude d’impact, qui nous permettrait de disposer d’éléments d’analyses pour légiférer en pleine connaissance des implications de nos choix.

D’autres articles nouveaux ont été introduits par notre commission, sur lesquels nous portons un regard attentif. Je pense, en particulier, à ceux qui concernent les liens entre le sport et les jeux d’argent. De fait, nous étions hostiles à la libéralisation des jeux d’argent et avions exprimé notre crainte que l’argent des pronostics ne perturbe le cours normal des compétitions. Nous dénoncions également les risques de trafic et de corruption.

Il semble que notre commission partage dorénavant nos préoccupations, puisqu’elle a adopté plusieurs articles visant à mieux encadrer les rapports entre les sportifs, les organisateurs de compétitions et les entreprises de jeux ! Cependant, nous demeurons persuadés que, si certains risques seront ainsi écartés, d’autres, malheureusement, sont appelés à perdurer : ils sont inhérents à ce type de pratiques. Les paris, les jeux d’argent, l’affairisme et l’éthique sportive ne font pas bon ménage.

Malgré l’intérêt que m’inspirent ces amendements retenus par notre commission, je demeure circonspect quant à l’attribution aux fédérations de la mission de contrôler, en vue d’une éventuelle procédure disciplinaire, les interdictions édictées en matière de paris en ligne à l’égard des acteurs des compétitions sportives. Ce contrôle et les sanctions qui y sont attachées doivent, à notre sens, rester entre les mains de l’Autorité de régulation des jeux en ligne, l’ARJEL, d’une part, et de la justice, en cas de poursuite, d’autre part.

En effet, comme l’a noté notre rapporteur, si les fédérations sportives ont la mission de prévoir les conditions de l’interdiction de parier qui frappe les acteurs d’une compétition sportive et, le cas échéant, de faire respecter cette décision, les sanctions qu’elles imposeront éventuellement gagneraient à s’appuyer sur des décisions prises par l’ARJEL ou par une instance judiciaire.

Nul besoin, alors, que les fédérations disposent des fichiers clients des opérateurs pour mener leur propre enquête. Dans ces conditions, je ne pourrai souscrire à l’article 6 quinquies nouveau adopté par la commission.

Compte tenu de la réalité de la présente proposition de loi, dont chaque article comporte un ensemble de mesures législatives spécifiques, je ne pourrai donner mon avis sur l’ensemble du texte. Qu’il me soit permis cependant, avant de conclure, de faire part de l’intérêt que je porte à deux articles concernant respectivement les conditions de diffusion audiovisuelle de brefs extraits de compétitions sportives et la possibilité de passer de courts messages de prévention contre le dopage à la télévision.

Enfin, bien que mon groupe soit relativement satisfait par certaines dispositions proposées, les interrogations, les inquiétudes et les désaccords que je viens d’exposer ne lui permettront pas de voter en faveur du texte qui nous est soumis.

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