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Affaires culturelles

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Lutte contre le dopage

Par / 19 octobre 2005

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun de ceux qui siégeaient dans cette assemblée en 1998 et 1999 doivent se souvenir de l’adoption de la loi Buffet, du nom du ministre des sports de l’époque.

Plus largement, la popularité de mon amie Marie-George Buffet était grande, car elle engageait la France dans une nouvelle étape de la lutte non seulement contre le dopage mais aussi pour la préservation de la santé des sportifs.

Cette loi permettait de prendre à bras-le-corps le problème réel et complexe qui touche le sport dans tous les pays du monde, tout en résistant au discours tout à la fois simplificateur et erroné du « tous dopés ».

Cependant, à cette époque, certaines voix se sont élevées pour dire que cette loi isolait la France au sein du sport international. Bien au contraire, nous constatons aujourd’hui qu’elle a permis d’enclencher un processus similaire de questionnement chez nos amis et voisins européens, puis d’obtenir du CIO, en février 1999, une déclaration arrêtant le principe de la création de l’Agence mondiale antidopage. Cette agence a pu élaborer, ensuite, un code de lutte contre le dopage. Enfin, monsieur le ministre, vous nous l’avez annoncé, une convention internationale sous l’égide de l’UNESCO vient d’être adoptée.

Nous savons que tout ne fut pas toujours facile et que les résistances sont encore grandes. Toutefois, un tel code universel est aujourd’hui attendu par tous ceux qui se préoccupent de la santé des sportifs et qui sont attachés à l’éthique d’une pratique et à des compétitions sans dopage ni tricherie.

Nous nous félicitons de ce qu’un tel combat humaniste pour le respect du sport, des sportifs et des sportives puisse donc prendre une nouvelle direction.

Dans le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui, le Gouvernement prend acte des modifications intervenues au niveau international et propose de mettre notre législation nationale au diapason des nouvelles normes édictées par l’Agence mondiale antidopage. La France peut donc s’honorer d’avoir été à l’avant-garde du combat pour la lutte mondiale antidopage.

Vous comprendrez, dans ces conditions, que nous soyons favorables au texte proposé, car nous soutenons l’orientation des actions entreprises.

Cependant, demeurent des interrogations, des inquiétudes, voire des désaccords, comme le rapporteur de notre commission le montre dans son rapport, que j’approuve. Les observations qui y sont formulées montrent bien que tout n’est pas réglé.

A cet égard, la France doit poursuivre et même amplifier son action concernant tant sa réglementation nationale que la mise en place de règles internationales.

Monsieur le ministre, il ne faudrait pas que la création d’une agence indépendante de lutte contre le dopage vous fasse baisser la garde.

M. Ivan Renar. Un escrimeur ne baisse jamais la garde ! (Sourires.)

M. Jean-François Voguet. La puissance publique doit rester vigilante et active pour lutter contre un tel fléau. Il faut continuer à faire preuve de volonté politique et de fermeté.

Nous le savons, la lutte contre le dopage est une action difficile. Elle se heurte à différentes formes de pressions, qui sont liées à des enjeux économiques, bien sûr, mais aussi, parfois, politiques, voire nationalistes. Ces pressions pèsent sur les athlètes et les incitent, dans certains cas, à recourir au dopage.

Un engagement de la puissance publique, de l’Etat, est donc nécessaire. Cela implique une volonté politique forte et constante ainsi que des moyens humains et financiers au service de la lutte contre le dopage. Cette action, vous le savez bien, monsieur le ministre, est bien plus large que celle qui est définie dans le projet de loi, car elle concerne l’ensemble des moyens mis en place au service du mouvement sportif.

Dans ces conditions, nous avons un doute sur la nécessité de supprimer le caractère d’établissement public du LNDD de Châtenay-Malabry, caractère qui marquait l’attachement des pouvoirs publics à ses travaux. Vous connaissez notre intérêt pour ce type de structure, ainsi que l’importance et la pertinence du travail de ce laboratoire, même s’il faut évidemment faire encore mieux.

Nous avions cru qu’une collaboration de cette structure sous tutelle de votre ministère avec la nouvelle agence était possible. Vous avez fait un autre choix ; nous le regrettons.

Monsieur le ministre, par ce projet de loi, vous êtes dorénavant directement responsable de l’engagement et de la coordination des actions d’éducation, de prévention et de recherche. Vos responsabilités sont élargies.

Tout le monde, y compris M. le rapporteur, s’accorde à dire qu’il ne faut pas se satisfaire des actions actuellement mises en oeuvre dans ces domaines. Chacun, ici, sait que le dopage est un fléau qui sévit encore et toujours. Les orateurs qui m’ont précédé en ont donné des exemples significatifs.

Sans tomber dans le discours du « tous dopés », qui serait évidemment une injure à l’immense majorité de nos athlètes, force est de constater que le dopage touche non pas seulement certains sportifs de haut niveau, mais aussi des amateurs, des jeunes en formation, parfois même des enfants.

Dans ces conditions, nous ne pouvons que regretter que, dans la loi Fillon, l’éducation physique et sportive, y compris dans ses composantes éducatives liées au civisme et à l’éthique, ait été écartée du socle commun des connaissances de notre enseignement scolaire.

Monsieur le ministre, vos responsabilités dans le domaine de l’éducation, de la prévention et de la recherche deviennent essentielles, et je voudrais vous faire part de nos inquiétudes sur les moyens dont vous allez disposer.

Ce projet de loi sur le dopage ne peut trouver sa pleine application, son efficacité même, qu’avec des moyens nouveaux, qui ne nous semblent pas être au rendez-vous de l’année 2006. Nous attendons votre avis sur ce point particulier.

Ma crainte est aussi forte quand vous annoncez la mise en place à moyens constants de l’Agence française de lutte contre le dopage, compte tenu de ce que sont les budgets actuels du CPLD et du LNDD.

Pourtant, dans ce projet de loi, vous confiez l’organisation des contrôles antidopage à cette agence, alors que c’est votre ministère qui en avait auparavant la charge. Cette compétence va nécessiter des moyens importants. Or, en l’état de vos propositions budgétaires, je ne suis pas sûr que l’agence disposera réellement des moyens financiers à la hauteur de ses responsabilités.

Globalement, le manque de moyens mis à la disposition de votre ministère et de la nouvelle agence risque de freiner l’action annoncée, de mettre en cause la volonté affichée.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au-delà les inquiétudes dont je viens de vous faire part, je voudrais formuler un certain nombre de remarques, appeler à la vigilance et à l’action. Pour l’essentiel, je le répète, ces remarques figurent dans le rapport de la commission.

La première concerne la liste des produits et procédés dopants interdits : celle qui sera dorénavant appliquée est plus restreinte que celle qui est chez nous actuellement en vigueur.

M. Jean-François Lamour, ministre. Mais non !

M. Jean-François Voguet. Si l’apparition d’une liste internationale est globalement un progrès, elle marque selon moi un certain recul pour notre pays.

Monsieur le ministre, je souhaite que vous agissiez avec persévérance et fermeté dans les instances internationales, pour que nous parvenions à une liste encore plus contraignante.

L’enjeu est très important. Certes, je ne suis pas sans méconnaître les pressions qui s’exercent sur le plan international contre les mesures édictées par l’AMA ni la mauvaise volonté que certains mettent à les appliquer.

Tout n’est pas réglé avec l’ensemble des fédérations sportives ; la presse s’en est largement fait l’écho dernièrement. Cependant, je vous encourage à faire preuve de fermeté en ce domaine.

L’action de la France a toujours été à la pointe du combat contre le dopage et doit, à notre sens, y demeurer. Il faut à la fois agir pour que les règles édictées deviennent des règles intangibles pour tous, en confortant toujours plus le rôle de I’AMA et, dans le même temps, faire progresser les réglementations au sein même de l’Agence.

La mission est difficile, mais elle est à la hauteur de l’enjeu d’un sport plus mondialisé et plus commercialisé, dans lequel seules la performance et la réussite sont valorisées et où les « cadences » deviennent véritablement infernales.

Si nous voulons maintenir une éthique à la hauteur de nos espérances, il nous faut rester fermes.

Ma deuxième remarque concerne les autorisations d’usage thérapeutique.

Je ne suis pas de ceux qui, a priori, y voient une autorisation à se doper. Je pense même que la reconnaissance de celles-ci peut marquer la fin d’une certaine hypocrisie. C’est pour cela que j’y souscris. Je me félicite d’ailleurs du fait que le médecin soit ainsi appelé à plus de responsabilité dans ce domaine.

Cependant, les AUT ne peuvent être considérées comme une avancée sans que soient mis en place les contrôles indispensables à leur validation. Certes, je n’ignore pas l’évidente nécessité d’une validation rapide. C’est pourquoi la nouvelle agence doit disposer de moyens lui permettant de gérer ces AUT dans des conditions assurant leur qualité.

Enfin, troisième remarque, la volonté d’obtenir de nouveaux résultats en matière de lutte contre le dopage nécessite la mobilisation de tout le monde sportif, de tous ceux qui sont partie prenante de la bonne santé de nos sportifs, des différents partenaires, qu’il s’agisse des sponsors, des laboratoires pharmaceutiques, des médecins de ville, des pharmaciens et des vétérinaires. C’est pourquoi, monsieur le ministre, je regrette que vous fassiez l’impasse sur une telle nécessité dans ce projet de loi.

Avec ce texte, nous allons restructurer les organismes et redistribuer les rôles dans le cadre de la lutte contre le dopage. Notre groupe souscrit à ces objectifs, sous réserve des critiques, des craintes, des interrogations et des remarques que je viens de formuler et qui justifient les amendements que nous avons déposés.

Il faut cependant, pour que notre prise de position soit complète, que je vous fasse part d’une autre attente, tout aussi forte. Nous aimerions connaître les dispositions que vous comptez prendre pour les nouvelles missions qui vous sont attribuées dans le cadre de ce projet de loi.

Nous sommes dans l’attente d’une politique active en matière d’éducation et de prévention. Cette attente est encore plus forte en ce qui concerne la politique que vous comptez développer en matière de recherche fondamentale et appliquée en lien avec la médecine sportive.

Mais sans doute avez-vous l’intention d’inscrire ces politiques au sein du grand plan de développement du sport que vous nous annonciez au mois de juillet dernier pour la fin du mois de septembre. Il nous tarde d’en prendre connaissance !

En effet, pour que ce projet de loi s’inscrive pleinement dans une perspective de réussite, il doit s’appuyer sur la mise en oeuvre d’une mobilisation permanente, à partir d’engagements clairs de la puissance publique, au côté du mouvement sportif.

Soyez assuré, monsieur le ministre, que la détermination du groupe communiste républicain et citoyen est forte et que celui-ci votera le présent texte sur le fondement des exigences que je viens de rappeler.

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