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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 : question préalable

Par / 13 novembre 2006

Le P.L.F.S.S. ne respecte pas les principes de régularité et de sincérité des comptes et ne permet d’assurer l’égal accès aux soins pour tous.

Une des règles d’or de la comptabilité est de ne recourir à l’emprunt que pour financer les dépenses d’investissement, mais il semble que vous l’ignoriez : la réduction annoncée du déficit des comptes sociaux ne se fait ici ni par une augmentation des ressources de la sécurité sociale ni par une subvention de l’État mais bien plutôt par un recours systématique à l’emprunt.

De ce fait, les établissements publics en charge de la gestion de branches du régime général n’ont pu assurer l’équilibre financier de leur branche respective comme leur en fait obligation le Code de la sécurité sociale.

Vous n’assumez pas non plus vos responsabilités envers l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et les fonds qui concourent au financement de la sécurité sociale.

Lors de son audition, le président de l’ACOSS nous a indiqué que l’État ne respectait pas l’article L. 139-2 du Code de la sécurité sociale : il en résulte par cet organisme des frais financiers qu’il ne devrait pas avoir à supporter si le principe de neutralité financière des flux de trésorerie entre l’État et la sécurité sociale était respecté.

Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le Ministre, le Ffipsa n’a pas été siphonné par les trente-cinq heures.

Le Ffipsa a remplacé le budget annexe de prestation sociale agricole (BAPSA) qui était toujours voté à l’équilibre. Est- ce la raison pour laquelle vous l’avez supprimé ? Je doute que l’amendement de la commission - que je voterai - vous pousse à accorder au Ffipsa les sommes que vous lui refusez depuis deux ans. M. Copé ne m’a guère laissé d’espoir sur ce point.

Les moyens utilisés pour financer les découverts de l’ACOSS sont très contestables. L’État est pris en flagrant délit d’insincérité : il travestit les besoins de financement en besoins de trésorerie afin de recourir à des ressources non permanentes. Il donne à l’article L.O.111-3 du Code de la sécurité sociale une interprétation exclusive qui n’est pas conforme à l’esprit du texte.

En 2007, le plafond d’avance a été fixé à 28 milliards par le régime général et à 7 milliards par le Ffipsa : à de tels niveaux il s’agit bien de déficits structurels et non de simples besoins de trésorerie. Le courage et la volonté vous manquent pour procéder aux réformes nécessaires. Comment espérer obtenir en 2007, année électorale, ce qui n’a pas été réalisé en cinq ans ? La réforme de l’assurance maladie de 2004 n’a été qu’un coup d’épée dans l’eau. La commission des Affaires sociales, dans son communiqué du 8 novembre, en convient : « L’utilisation de recettes ponctuelles à effet unique n’est qu’un pis-aller dans l’attente d’une véritable réforme ». La grande réforme « Douste-Blazy » n’était donc pas une véritable réforme ?

Rien n’est prévu pour financer le déficit passé qui s’élèvera à 16 milliards fin 2006. Sur ce sujet, le gouvernement reste muet ou évasif.

Ce besoin de financement devrait s’établir, dans le meilleur des cas, à 24,4 milliards pour l’ensemble des régimes de base et à 16 milliards pour le régime général si l’on choisit le scénario économique bas, ces besoins s’élèvent respectivement à 46,5 milliards et à 29,3 milliards. Au lieu d’augmenter les ressources, par le biais de prélèvements sociaux ou de prélèvements fiscaux, vous diminuez l’impôt sur le revenu, ce qui profite essentiellement aux riches.

En 2002, le déficit du régime général s’élevait à 3,4 milliards. Aujourd’hui il atteint 50 milliards, dont un découvert d’au moins seize milliards.

Rien à voir avec la présentation tronquée que vous en faites, qui occulte les années 2002 et 2003, et selon laquelle la sécurité sociale irait beaucoup mieux. Comme si votre responsabilité n’était engagée qu’à partir de 2004, année du déficit record de la sécurité sociale, auquel le nom de M. Douste-Blazy restera attaché.

En soustrayant les soldes du F.S.V. et du Ffipsa, vous masquez la réalité des déficits. En les intégrant, comme le réclame la Cour des comptes, on constate que le déficit s’aggrave de 2004 à 2005, passant de 14,2 milliards à 14,4 milliards. Pas plus que les autres, ce budget ne respecte la loi de 1994 sur la compensation des exonérations de cotisations sociales. Comment l’État compte-t-il apurer sa dette de 7 milliards en 2007 ? La prise en charge de frais financiers par ce dernier ne saurait nous satisfaire.

Enfin, ce P.L.F.S.S. aggrave les inégalités face à la santé et à l’accès aux soins.

En 2004, nous avons consacré plus de 11 % de notre P.I.B. à la santé - soit 147 milliards - mais seulement 3 % de cette somme à la prévention. Cette faiblesse interdit une véritable politique de protection de la santé, notamment des plus pauvres. Elle est non seulement en contradiction avec la loi du 4 mars 2002 qui précise que le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous les moyens disponibles pour toute personne, mais aussi sans rapport avec les grandes ambitions affichées dans la loi de santé publique de 2004.

Le libre et égal accès aux soins pour tous, même s’il était effectif, ne saurait nous exonérer de la mise en œuvre d’un projet collectif de prévention.

Votre politique de maîtrise des dépenses sans augmentation des ressources compromet le principe d’égal accès. L’inégalité devant la prévention et l’accès aux soins a toujours constitué un problème, mais il s’est aggravé avec la mise en place de la réforme d’août 2004.

Ces faits ont été corroborés par Médecins du monde, l’Observatoire de l’accès aux soins, l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale en 2003, et plus récemment par la Commission nationale consultative des droits de l’homme à laquelle appartient le président Vinçon, dans son avis sur la préservation de la santé, l’accès aux soins et les droits de l’homme.

Tous confirment un fort recul de l’accès aux soins des plus démunis souvent privés : 5 millions de personnes au moins sont concernées.

L’institution de la contribution forfaitaire d’un euro est un facteur supplémentaire d’exclusion pour les plus pauvres. De plus, la complexité des formalités administratives mises en place, notamment pour limiter les abus, a des effets pervers : loin de dissuader les fraudeurs, elles ont eu pour effet d’interrompre des soins ou d’empêcher la prise en charge de ceux qui ne savent pas bien tirer parti du système de santé.

Médecins du monde indique que les trois quarts de ses patients sont sans couverture maladie, alors que la moitié d’entre eux pourrait y prétendre, faute d’avoir pu surmonter les obstacles administratifs pour obtenir la C.M.U.-C. ou l’A.M.E.

Les médecins libéraux ne jouent pas toujours le jeu : 40 % des médecins du secteur II refusent de prendre en consultation les bénéficiaires de la C.M.U.

La HALDE vient de statuer considérant que ce refus de soins contrevenait à l’article L. 1110-3 du Code de la santé publique qui dispose que « aucune personne ne peut faire l’objet de discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins ». Cette attitude des médecins est contraire au Code de déontologie. Il est vrai qu’à leur décharge, l’instauration du parcours de soins ne leur facilite pas la tâche : les bénéficiaires de la C.M.U. consultent sans avoir choisi de médecin traitant et la pénalité qui en résulte est défalquée des honoraires des praticiens qu’ils consultent.

La sous médicalisation de certaines zones rurales ne vous laisse pas indifférents, mais on peut s’interroger sur la cohérence des dispositions législatives adoptées et des mesures que vous avez prises. Toutes de nature incitatives, elles ont pour dénominateur commun de mettre à contribution les collectivités territoriales et ne suffiront pas à juguler un phénomène qui va s’amplifier en raison de la pénurie de médecins.

Mais un autre facteur s’oppose à la réduction des inégalités territoriales ou sociales : la logique libérale de l’Union européenne, du traité de Maastricht et du pacte de stabilité contraint à restreindre les dépenses sociales. La santé devient une marchandise comme les autres et le libéralisme économique s’accommode fort bien d’un accès inégalitaire. C’est même une condition de son succès. Le fer de lance de cette marchandisation de la santé est évidemment le plan Hôpital 2007 qui instaure l’hôpital-entreprise, avec pour seul objectif la rentabilité. Trop souvent, la comparaison des coûts et l’alibi des normes sécuritaires servent de justificatifs, quel que soit l’avis des populations. À cet égard, le rapport Vallencien sur les petits hôpitaux publics est un modèle du genre. Il préconise la fermeture de 113 blocs opératoires, alors que seulement 4 d’entre eux auraient été visités et sans que soient relevés, ailleurs, de mauvais fonctionnement. En outre, le rapporteur s’est bien gardé de porter le moindre regard sur les cliniques commerciales, par principe au- dessus de tout soupçon. Vous avez, monsieur le Ministre, temporisé en ne donnant pas suite pour le moment à ce rapport mais on doit s’attendre à ce qu’après les maternités, les blocs opératoires et les services d’urgence disparaissent d’une grande partie du territoire.

La politique du gouvernement ne s’inscrit plus dans la logique d’une couverture sanitaire optimale conforme aux intérêts de la population, mais dans celle d’une recherche de rentabilité avec pour corollaire, l’accentuation des inégalités d’accès aux soins. C’est pourquoi je vous demande d’adopter cette mention tendant à opposer la question préalable.

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