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Les questions orales

L’ensemble des questions orales posées par votre sénatrice ou votre sénateur. Au Sénat, une question orale peut, suivant les cas, être suivie d’un débat. Dans ce cas, chaque groupe politique intervient au cours de la discussion.

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Aéroports de Paris

Par / 15 juin 2004

par Marie-Claude Beaudeau

La catastrophe survenue au terminal E de l’aéroport de Paris- Charles-de-Gaulle, apporte un éclairage nouveau sur la responsabilité et les modes de gestion des Aéroports de Paris. Dans son rapport de 2002, la Cour des comptes juge « insuffisamment claire » la distinction entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre, pour le suivi des chantiers et la définition des enveloppes financières des projets. Elle constatait également une grande complexité des techniques de construction. Elle s’interrogeait encore sur la réalisation du terminal E, les plans d’exécution ayant été refusés par le bureau de contrôle et l’entreprise de gros œuvre rencontrant des difficultés de construction des coques de couverture du hall, lesquelles risquaient « de s’effondrer ». J’aurais alors posé une question écrite au ministre, il ne m’a pas encore répondu.

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Pas encore !

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Mes craintes pour le hall F se sont dramatiquement confirmées avec l’accident du hall E. Cela n’a pas empêché M. Bussereau, au lendemain de l’accident, d’annoncer la poursuite de la privatisation d’Aéroports de Paris (A.D.P.), tandis que M. Graff, président d’A.D.P., se prononçait pour la mise sur le marché et que le Journal des finances recommandait, à l’achat l’action Vinci, constructeur des parkings d’A.D.P. ! Une telle catastrophe appelle un arrêt de la privatisation. A.D.P. doit redevenir l’établissement public qui, parti de rien en 1945, a su devenir un opérateur de tout premier plan dans la compétition mondiale. Comment une société anonyme pourrait-elle assurer les missions de service public actuellement confiées à A.D.P. ? Entre 1996 et 2000, les bénéfices annuels se sont situés entre 60 et 120 millions d’euros, les redevances aériennes et domaniales ont représenté 735 millions d’euros, l’assistance en escale a rapporté 169 millions d’euros et la concession de commerces, 187 millions d’euros. Ces sommes sont allées directement aux activités aéroportuaires ; mais demain, avec une société anonyme ? L’endettement s’est accentué : A.D.P. a besoin de toutes ses ressources !

 Une société anonyme, disposant d’un tel patrimoine, ne fera-t-elle pas l’objet d’un appel d’offres européen pour confier la gestion des plateformes parisiennes à n’importe quel opérateur européen ? Comment envisager que le statut actuel, qui garantit l’emploi et la carrière de 8 300 agents, se transforme en simple accord d’entreprise ? Ces agents ne laisseront pas toucher à leur statut, qui garantit la qualité du service public !

 Comment pouvez-vous envisager de confier à un opérateur privé, des fonctions régaliennes de l’État comme la perception de taxes, la répartition des fonds publics - 55 millions d’euros en 2004 - pour l’aide à l’insonorisation, mais aussi la gestion de responsabilités publiques comme des opérations de police et de sûreté, lesquelles ont représenté 65 millions d’euros en 2003 ?

 M. LE PRÉSIDENT. - Veuillez conclure !

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Les redevances aériennes sont fixées par arrêté ministériel, non par une société anonyme : on ne saurait confier à une entreprise privée, les aides aux riverains, pas plus que les redevances domaniales ! La Cour des comptes prévient de possibles conflits d’intérêts entre le public et le privé. Monsieur le Ministre, comment comptez-vous préserver A.D.P. d’une privatisation qui détruirait des emplois et menacerait la poursuite des missions de service public ?

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Vos critiques et mises en garde relèvent d’une période où je n’étais pas encore ministre de l’Équipement, elles visent plutôt mon prédécesseur - que vous connaissez parfaitement bien… Les mots ont un sens et votre dialectique est erronée : la réforme d’A.D.P. n’est pas sa privatisation (M. le ministre assène la phrase à trois reprises) - je vous le répète pour que vous ne disiez pas, en sortant de cet hémicycle : « le gouvernement privatise ».

 À l’issue de la transformation d’A.D.P. en société anonyme, l’État entend conserver la majorité du capital de cette entreprise, qui est un instrument essentiel de la politique d’aménagement et d’attractivité du territoire.

 Je ne voudrais pas que l’accident dramatique qui a détruit une partie du terminal 2E ouvre sur la polémique sur le changement de statut. Les objectifs stratégiques de cette réforme demeurent.

 A.D.P. est l’un des tout premiers exploitants aéroportuaires mondiaux et le deuxième opérateur européen. Cette entreprise investit massivement, elle emploie environ huit mille agents. Les aéroports parisiens constituent un facteur clé de la compétitivité et de l’attractivité de la France.

 Le statut d’établissement public date de 1945, il n’est plus adapté aux enjeux du secteur aérien, car il limite les possibilités de financement et de développement de l’entreprise, il entrave ses capacités de réaction face aux évolutions du transport aérien. C’est pourquoi, le gouvernement souhaite faire d’Aéroports de Paris une société anonyme - avec de nouvelles facultés d’initiative et une plus grande responsabilité vis-à-vis des transporteurs aériens, des passagers, des riverains et des pouvoirs publics.

 Cette évolution ne doit pas se faire sans garanties.

 Tout d’abord, le gouvernement souhaite que l’entreprise demeure, avec tous ses métiers. Seule l’activité de contrôle de la navigation aérienne sera appelée à réintégrer la Direction générale de l’aviation civile. Les aéroports franciliens continueront à être exploités par l’entreprise dans le cadre d’une autorisation donnée par la loi, sans limitation de durée, comme cela est le cas actuellement.

 Toutes les garanties juridiques seront prises pour que les biens indispensables au service public aéroportuaire, qui seront intégrés dans le patrimoine de la nouvelle société anonyme, ne puissent pas être utilisés à d’autres fins. Un cahier des charges viendra clarifier les obligations s’imposant à l’entreprise tant en termes de service à rendre aux compagnies aériennes et aux passagers qu’en termes d’enjeux d’aménagement du territoire.

 Le cadre de la redevance aéroportuaire sera modernisé pour assurer un juste équilibre entre les intérêts des transporteurs et des exploitants. L’État reste garant de la sécurité et de la protection environnementale. Il n’y a nul paradoxe à ce qu’A.D.P. gère le dispositif d’aide à l’insonorisation des logements.

 Enfin, le gouvernement s’est engagé à maintenir sous sa forme actuelle, je le répète, le statut réglementaire du personnel.

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Votre réponse ne me convainc nullement. Vous rejeter la responsabilité sur le gouvernement précédent (M. Signé : « C’est leur antienne ! ») : je vous parle continuité de l’État ! Des mots, dites-vous : je vous ai cité des paragraphes entiers du rapport de la Cour des comptes !

 Vous prétendez qu’il n’y aura pas de privatisation, mais vous créez une société anonyme. Vous soumettez A.D.P. à la loi du marché, à ses fluctuations et sa volatilité. Les actionnaires privés n’hésiteront pas à vendre leurs titres en cas de crise ! C’est le début du bradage de l’entreprise publique ! Vous favorisez l’externalisation de tout ce qui fait la force d’A.D.P. !

 Une société anonyme n’offrira pas les mêmes garanties ni les mêmes conditions. Vous déstabilisez la vie, l’avenir, le travail, la qualification des employés.

 C’est le début de la privatisation. Rien n’empêchera l’ouverture ultérieure du capital : la gestion des trois aéroports en pâtira, et la régression sociale menace.

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Par respect pour la représentation nationale, je tiens à mettre les points sur les i.

 Premièrement, les conclusions de la Cour des comptes portent sur les années de gestion du précédent gouvernement : nous en assumons les conséquences.

 Deuxièmement, ne jouons pas sur les mots. Il y a privatisation quand la part de l’État est inférieure à 50 %. À plus de 50 %, l’État conserve la majorité et, partant, il veille au grain.

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Vous dites toujours ça !

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Troisièmement, n’inquiétez pas les personnels.

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Ils sont inquiets !

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Alors rassurez-les !

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Surtout pas !

 M. DE ROBIEN, ministre de l’Équipement. - Leur statut ne changera pas.

 Mme Marie-Claude BEAUDEAU. - Ce sera comme pour France Télécom !

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