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Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Expérimentation par les collectivités territoriales

Par / 21 juillet 2003

par Josiane Mathon-Poinat

Monsieur le président,
Monsieur le ministre,
Mes cher(e)s collègues,

Le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui en première lecture, s’inscrit dans le cadre général de la décentralisation que le premier ministre voulait mener comme un voyage, en « 150 jours », voyage chaotique de la réforme.
Mais depuis ce printemps, des imprévus apparaissent, ceux de la contestation sociale et citoyenne face à ce qui se révèle être un choix de déstructuration de la République.

Vous n’avez pas voulu d’un débat national préalable à la réforme constitutionnelle cet hiver. Vous n’avez pas voulu vous expliquer devant les Français sur le sens et la portée de vos actes. Ils les ont pourtant vite compris et en manifestent, depuis, leur refus.

Vous avez du reculer devant la détermination de la communauté scolaire et surseoir à la décentralisation des personnels. Vous avez été désavoués par les électeurs lors du référendum en Corse, comme vous l’a rappelé ma collègue et amie Nicole Borvo.

Votre dessein peu à peu s’éclaire dans l’esprit de nos concitoyens.
Ce n’est pourtant pas le texte dont nous sommes saisis aujourd’hui qui en facilite la compréhension. Avec ce texte, vous persévérez dans la mise en œuvre de votre projet réactionnaire, alors qu’il eut été utile et démocratique de faire une pause et d’ ouvrir enfin dans le calme et la transparence le grand débat que nous sommes en droit d’attendre sur les finalités et les moyens d’une décentralisation moderne et solidaire.

Au lieu de cela, nous avons droit à un texte technique, à des mesures pour spécialistes de la technocratie.

Notre opposition à ce texte repose sur deux éléments forts.

En premier lieu, nous nous opposons à l’objectif que vous assignez à la décentralisation.

Vous prenez le soin de parer des vertus de la démocratie de proximité votre œuvre néfaste à la société française.
Vous évoquez la nécessité de rapprocher les citoyens des lieux de décision, alors qu’ en moins d’un an, vous avez verrouillé les modes de scrutin des élections régionales, européennes et sénatoriales, vous en avez modifié les circonscriptions, pour instaurer de force un bipartisme étranger à la culture politique de notre pays, cadenassant les expressions contraires au libéralisme ambiant.
Vous avez refusé chacune de nos propositions pour développer la démocratie participative, lors du débat sur le referendum local.
Non, votre argument démocratique ne tient pas.

Notre collègue monsieur Longuet, dans son rapport au nom de la commissions des lois, a exhumé les raisons fondamentales de ce projet de loi relatif à l’expérimentation, du discours du candidat jacques Chirac sur ce thème. Celui qui est devenu dans des conditions connues de tous Président de la République, cite, repris par notre collègue de lorraine, "l’impératif européen" et la "nécessité économique et sociale".

Votre vision de la décentralisation est d’abord guidée par ces objectifs d’intégration européenne - j’allais dire "maastrichienne" tant l’actuelle construction de l’Union européenne est guidée par ce traité et ses dogmes ultra-libéraux.
Cette construction exige des Etats membres qu’ils se délestent de ce qui entrave la libre concurrence. Les activités d’intérêt général sont ouvertes à la compétition entre multinationales, les services publics sont privatisés, le budget de l’Etat contraint à ne pas répondre aux impératifs du pays.

Ce schéma se heurte à la résistance des peuples, particulièrement en France, on l’a vu avec ce printemps dans l’Education nationale. Notre rapporteur analyse rapporte que l’expérimentation permet " de lever les réticences que suscite souvent toute perspective de changement. Conclusion : imposons ces réformes localement.
Votre projet politique présenté nationalement et globalement ne passe pas, aussi vous vous donnez les moyens institutionnels de l’ appliquer région par région.
Ce texte menace l’unité de la République et malmène la liberté et l’égalité des citoyens.

Une deuxième raison nous amène à rejeter ce texte.

Ce projet de loi est flou dans le détail de ses dispositions.

Il ne précise pas les compétences qui pourront faire l’objet d’expérimentation par une collectivité, hors les conditions d’exercice des libertés publiques et les droits constitutionnels.

Il limite à cinq ans la durée de l’expérimentation, mais autorise dans des conditions imprécises des délais supplémentaires qui peuvent presque en doubler la période. (4ans)

Le gouvernement aurait la maîtrise de l’autorisation d’expérimenter, mais aucun critère n’est fixé pour le guider dans son appréciation.

La possibilité serait ouverte aux collectivités de modifier la législation qui encadre leur mode de gestion de leurs compétences : d’une collectivité à l’autre le même service répondra à des règles différentes, comme sous l’ancien régime.
M. le ministre envisagez-vous la possibilité du retour de la taille et la gabelle ?

En tout état de cause, le financement de ces expérimentations n’est pas prévu. Non seulement l’égalité entre citoyens se verrait rompue, mais leurs collectivités seraient elles-mêmes aux prises avec leurs inégalités de situation et de ressources.

Enfin, l’article deux de ce projet de loi frise le conflit constitutionnel.
Le nouvel article L.O.5111-5 ouvrirait aux établissements publics regroupant des collectivités territoriales la possibilité de participer a des expérimentations.
N’y a-t-il pas là, un risque d’inconstitutionnalité, du fait de l’absence de reconnaissance des établissements publics de coopération intercommunale dans notre loi fondamentale ? Certes la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 permet cette ouverture mais cependant les EPCI ne sont pas reconnus comme collectivité territoriale dans la Constitution.

Monsieur le ministre,

Malgré les avertissements reçus du peuple directement, vous vous obstinez à mettre en œuvre coûte que coûte le dépeçage de la république. Votre précipitation indique votre état de fébrilité. Vous présenter un texte flou et à l’imprécision juridique certaine, que le conseil constitutionnel aura à commenter.

Nous vous avons, en vain, proposé de prendre le temps nécessaire à l’élaboration patiente et constructive des lois décentralisatrices .
Nous nous opposerons à ce texte.

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